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vendredi 10 mai 2013

Le cœur perdu d'Élysabeth


Par Marie-Catherine Bolduc

CEA de Saint-Prosper


C’était un samedi après-midi ensoleillé et froid du mois de janvier. La neige craquait sous mes bottes alors que je me dirigeais vers l’aréna pour voir jouer mon chum Nico. C’était lui le capitaine de son équipe de hockey. J’étais fière de lui et je l’aimais plus que tout. Même si les deux dernières semaines nous n’avions pas réussi à nous voir souvent. Pour plusieurs raisons, selon lui. Je trouvais Nico très distant et lunatique. C’est pour ça que je voulais lui faire une petite visite surprise. Alors que j’allais le regarder jouer, sans trop me faire remarquer, j’allai ensuite l’attendre après sa partie, lui sauter au cou et l’embrasser en lui chuchotant que je m’étais ennuyé.

Après que la sirène de la troisième période eût sonné pour annoncer la fin du match, je me suis précipitée à la cafétéria pour attendre avec impatience Nico qui allait sortir de la chambre des joueurs. Je me demandais s’il serait content et quelles réactions il allait avoir en me voyant là. J’étais assise à une table dans le fond de la cafétéria pour être certaine de voir tout ce qui se passait avec cet achalandage.

Enfin! La porte de la chambre des joueurs s’est ouverte et j’ai vu Nico qui sortait avec ses coéquipiers. Sans savoir pourquoi, je ne me suis pas levée tout de suite, je voyais bien que Nico ne m’avait pas encore remarquée. Ils avaient tous l’air d’attendre quelqu’un d’autre, puis une belle blonde aux yeux bleu pétant apparut. Il lui donna un tendre baiser sur la joue et lui sourit. Tout ça sous mes yeux. J’avais le cœur qui s’était mis à débattre à une vitesse folle, mon rythme cardiaque s’affolait. J’avais mal. Je ne pouvais pas croire que Nico voyait quelqu’un d’autre. Je comprenais tout maintenant. Voilà pourquoi il était « très occupé » ces derniers temps.

Je me suis levée brusquement et Nico m’a vue. Il m’a regardée et a vite baissé la tête, comme s’il était gêné. Il s’était même écarté de la blonde, qui était trop blonde à mon goût.

-      Élysabeth! Mais qu’est-ce que tu fais ici ?

-      J’étais venue te rendre visite, Nico. Mais comme je peux voir, je ne suis pas la seule.

Mon cœur était en feu et je me suis mise à pleurer, c’était plus fort que moi.

-          Ély, ce n’est pas ce que tu penses. Viens, je veux te parler.

Nico m’entraîna avec lui dehors et commença à me dire que Gaby était la sœur de Sébas, un gars de l’équipe, et que sans savoir pourquoi, il avait couché avec elle une fois alors que son équipe jouait à l’extérieur de la ville. C’était arrivé comme ça. Il me dit par la suite qu’il se sentait trop coincé avec moi, comme si on était mariés. Il me dit  aussi qu’il était encore jeune, qu’il n’avait que 17 ans et qu’il voulait vivre un peu sa vie d’ado avant de s’engager sérieusement.

Je n’en pouvais plus, je ne voulais plus rien entendre et je pleurais de plus belle. J’arrachai mon collier qu’il m’avait offert  la journée de notre premier anniversaire et je lui lançai au visage. Puis, je m’enfuis en courant jusqu’à chez moi. Je me suis réfugiée dans ma chambre où j’ai pleuré toute la soirée et toute la nuit. Mon cœur était en miettes.

Le lundi matin, je n’avais pas envie d’aller à l’école. Je m’étais regardée dans le miroir en me disant que j’avais beau être une rousse bouclée aux yeux verts, Nico était mon premier chum et il n’avait pas le droit de me briser le cœur ainsi. Les semaines et les mois ont passé. Voilà que la fin des classes arrivait et les examens aussi, mais je m’en foutais. Je m’étais fait de nouveaux amis et tout ce que je faisais, c’était de boire de l’alcool. Je manquais mes cours, je faisais la fête souvent, tout le temps même, car tout ce que je voulais, c’était Nico. Je l’aimais encore et il me manquait. J’avais même commencé à fumer du pot. Après tout, j’étais jeune et j’avais le cœur brisé. J’étais tannée de m’imaginer voir Nico partout. Tout me faisait penser à lui et ça me faisait mal.

Mon amie Mélodie avait même essayé de me présenter un garçon, Jonathan. Oui, il était très beau, il avait des allures d’un gars que toutes les filles rêvent d’avoir. Je l’ai  fréquenté quelque temps, sans doute pour faire plaisir à Mélodie. Il m’amenait au cinéma et aux fêtes de ses copains. Il me présentait comme sa blonde alors que pour moi, ce n’était pas le cas. Je voulais et je ne pensais qu’à Nico. Encore et encore. Pourtant, je n’étais pas très réceptive à ses offres et il le voyait bien. J’ai même couché avec lui quelques fois, mais ce n’était pas pareil qu’avec Nico. Après quelque temps, j’ai fini par le laisser tomber.

Un bon matin, ma mère est venue me réveiller pour me dire qu’elle m’amenait voir le médecin, car elle n’en pouvait plus de me voir ainsi. J’avais mal à la tête, je m’étais couchée à trois heures de la nuit, à moitié ivre et gelée comme une balle. Une fois dans le cabinet du docteur, je ne pensais jamais qu’il me dirait une telle chose. Moi, Élysabeth Marchand, j’étais en dépression. La séparation d’avec Nico m’avait causé un choc et je ne m’en étais pas remise. Il me prescrit des médicaments et des recommandations, dont d’arrêter de consommer et de m’entourer de bonne personnes.

Grâce à ma mère, les choses allaient mieux. L’automne arrivait, le début des classes aussi et je voulais commencer l’année du bon pied, car le secondaire 5, ce n’était pas rien. Alors que j’acceptais enfin ma situation et que je voulais reprendre ma vie en main, en rentrant de l’école un après-midi, sur la table, il y avait un colis que ma mère avait ramené de la poste. Il était adressé à mon nom. Intriguée, je me demandais bien ce que ça pouvait être. Je l’ouvris et je suis restée bouche-bée quelque instants. Je n’en revenais pas. Mes yeux se sont mis à se remplir de larmes et mon cœur à s’affoler de nouveau. Ça faisait si longtemps. Le collier que Nico m’avait offert, il était là, dans cette boite, en parfait état. Nico l’avait ramassé l’après-midi où je lui avais lancé et il l’avait toujours gardé depuis. Il y avait une petite note qui disait :

-          Je suis désolé, Élysabeth, de t’avoir fait tant de peine. Je t’en prie, pardonne-moi. Je ne t’ai jamais oubliée. Je t’aime encore. Nico. Xx

J’étais la fille la plus heureuse de monde. Je remerciai ma mère de m’avoir aidée à m’en sortir. Et elle avait raison, c’est lorsqu’on lâche prise que les choses s’améliorent. J’ai téléphoné à Nico et je lui ai donné rendez-vous au resto du coin où nous avons parlé des heures et des heures. Voilà que les morceaux de mon cœur se recollaient enfin.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Texte très touchant. Histoire habilement menée

Enseignantes a dit…

Super beau texte, Marie-Catherine! Je suis certaine que plusieurs filles se reconnaitront dans ton histoire!
Sophie Perron, conseillère pédagogique à l'éducation des adultes, CSBE