Par Marie-Catherine Bolduc
CEA de Saint-Prosper
C’était un samedi après-midi ensoleillé et froid du mois de
janvier. La neige craquait sous mes bottes alors que je me dirigeais vers
l’aréna pour voir jouer mon chum Nico.
C’était lui le capitaine de son équipe de hockey. J’étais fière de lui et je
l’aimais plus que tout. Même si les deux dernières semaines nous n’avions pas
réussi à nous voir souvent. Pour plusieurs raisons, selon lui. Je trouvais Nico
très distant et lunatique. C’est pour ça que je voulais lui faire une petite
visite surprise. Alors que j’allais le regarder jouer, sans trop me faire
remarquer, j’allai ensuite l’attendre après sa partie, lui sauter au cou et
l’embrasser en lui chuchotant que je m’étais ennuyé.
Après que la sirène de la troisième période eût sonné pour
annoncer la fin du match, je me suis précipitée à la cafétéria pour attendre
avec impatience Nico qui allait sortir de la chambre des joueurs. Je me
demandais s’il serait content et quelles réactions il allait avoir en me voyant
là. J’étais assise à une table dans le fond de la cafétéria pour être certaine
de voir tout ce qui se passait avec cet achalandage.
Enfin! La porte de la chambre des joueurs s’est ouverte et
j’ai vu Nico qui sortait avec ses coéquipiers. Sans savoir pourquoi, je ne me
suis pas levée tout de suite, je voyais bien que Nico ne m’avait pas encore
remarquée. Ils avaient tous l’air d’attendre quelqu’un d’autre, puis une belle
blonde aux yeux bleu pétant apparut. Il lui
donna un tendre baiser sur la joue et lui sourit. Tout ça sous mes yeux.
J’avais le cœur qui s’était mis à débattre à une vitesse folle, mon rythme
cardiaque s’affolait. J’avais mal. Je ne pouvais pas croire que Nico voyait
quelqu’un d’autre. Je comprenais tout maintenant. Voilà pourquoi il était
« très occupé » ces derniers temps.
Je me suis levée brusquement et Nico m’a vue. Il m’a regardée
et a vite baissé la tête, comme s’il était gêné. Il s’était même écarté de la blonde, qui était trop blonde à mon goût.
- Élysabeth! Mais qu’est-ce que tu fais ici ?
- J’étais venue te rendre visite, Nico. Mais
comme je peux voir, je ne suis pas la seule.
Mon cœur était en feu et je me suis mise à pleurer, c’était
plus fort que moi.
-
Ély,
ce n’est pas ce que tu penses. Viens, je veux te parler.
Nico m’entraîna avec lui
dehors et commença à me dire que Gaby était la sœur de Sébas, un gars de
l’équipe, et que sans savoir pourquoi, il avait couché avec elle une fois alors
que son équipe jouait à l’extérieur de la ville. C’était arrivé comme ça. Il me
dit par la suite qu’il se sentait trop coincé avec moi, comme si on était mariés.
Il me dit aussi qu’il était encore
jeune, qu’il n’avait que 17 ans et qu’il voulait vivre un peu sa vie d’ado
avant de s’engager sérieusement.
Je n’en pouvais plus, je ne voulais plus rien entendre et je
pleurais de plus belle. J’arrachai mon collier qu’il m’avait offert la journée de notre premier anniversaire et
je lui lançai au visage. Puis, je m’enfuis en courant jusqu’à chez moi. Je me
suis réfugiée dans ma chambre où j’ai pleuré toute la soirée et toute la nuit.
Mon cœur était en miettes.
Le lundi matin, je n’avais pas envie d’aller à l’école. Je
m’étais regardée dans le miroir en me disant que j’avais beau être une rousse
bouclée aux yeux verts, Nico était mon premier chum et il n’avait pas le droit de me briser le cœur ainsi. Les
semaines et les mois ont passé. Voilà que la fin des classes arrivait et les
examens aussi, mais je m’en foutais. Je m’étais fait de nouveaux amis et tout
ce que je faisais, c’était de boire de l’alcool. Je manquais mes cours, je
faisais la fête souvent, tout le temps même, car tout ce que je voulais,
c’était Nico. Je l’aimais encore et il me manquait. J’avais même commencé à
fumer du pot. Après tout, j’étais jeune
et j’avais le cœur brisé. J’étais tannée
de m’imaginer voir Nico partout. Tout me faisait penser à lui et ça me faisait
mal.
Mon amie Mélodie avait même essayé de me présenter un garçon,
Jonathan. Oui, il était très beau, il avait des allures d’un gars que toutes
les filles rêvent d’avoir. Je l’ai fréquenté quelque temps, sans doute
pour faire plaisir à Mélodie. Il m’amenait au cinéma et aux fêtes de ses
copains. Il me présentait comme sa blonde alors que pour moi, ce n’était pas le
cas. Je voulais et je ne pensais qu’à Nico. Encore et encore. Pourtant, je
n’étais pas très réceptive à ses offres et il le voyait bien. J’ai même couché
avec lui quelques fois, mais ce n’était pas pareil qu’avec Nico. Après quelque
temps, j’ai fini par le laisser tomber.
Un bon matin, ma mère est venue me réveiller pour me dire
qu’elle m’amenait voir le médecin, car elle n’en pouvait plus de me voir ainsi.
J’avais mal à la tête, je m’étais couchée à trois heures de la nuit, à moitié
ivre et gelée comme une balle. Une
fois dans le cabinet du docteur, je ne pensais jamais qu’il me dirait une telle
chose. Moi, Élysabeth Marchand, j’étais en dépression. La séparation d’avec
Nico m’avait causé un choc et je ne m’en étais pas remise. Il me prescrit des médicaments et des recommandations, dont
d’arrêter de consommer et de m’entourer de bonne personnes.
Grâce à ma mère, les choses allaient mieux. L’automne
arrivait, le début des classes aussi et je voulais commencer l’année du bon
pied, car le secondaire 5, ce n’était pas rien. Alors que j’acceptais enfin ma
situation et que je voulais reprendre ma vie en main, en rentrant de l’école un
après-midi, sur la table, il y avait un colis que
ma mère avait ramené de la poste. Il était adressé à mon nom. Intriguée, je me
demandais bien ce que ça pouvait être. Je l’ouvris et je suis restée bouche-bée
quelque instants. Je n’en revenais pas. Mes yeux se sont mis à se remplir de
larmes et mon cœur à s’affoler de nouveau. Ça
faisait si longtemps. Le collier que Nico m’avait offert, il était là, dans
cette boite, en parfait état. Nico l’avait ramassé l’après-midi où je lui avais
lancé et il l’avait toujours gardé depuis. Il y avait une petite note qui
disait :
-
Je
suis désolé, Élysabeth, de t’avoir fait tant de peine. Je t’en prie, pardonne-moi.
Je ne t’ai jamais oubliée. Je t’aime encore. Nico. Xx
J’étais la fille la plus heureuse de monde. Je remerciai ma
mère de m’avoir aidée à m’en sortir. Et elle avait raison, c’est lorsqu’on
lâche prise que les choses s’améliorent. J’ai téléphoné à Nico et je lui ai
donné rendez-vous au resto du coin où nous avons parlé des heures et des
heures. Voilà que les morceaux de mon cœur se recollaient enfin.