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lundi 10 décembre 2012

Souvenirs


Trycia Lebel, CEA de Saint-Prosper

Le crépuscule était magnifique. De plus en plus bas, atteignant l’horizon, le soleil renvoyait sur l’eau ses derniers rayons de douceur, telle une caresse emportée par le vent. Dans le ciel, les nombreuses couleurs éclatantes du soleil couchant se reflétaient sur les vagues miroitantes de la mer. Tout était calme : la plage déserte, les vagues de l’océan, même le souffle du vent. Ces rivages paisibles, qui s’étendaient à perte de vue, étaient très rarement fréquentés, cet endroit étant trop loin de la civilisation. Nul ne dérangeait la quiétude, la paix de cet endroit unique. Nul ne venait ici. Nul, sauf moi.
Seule, assise sur les rives de la mer, je pense. Aux nombreux printemps qui sont nés, aux étés qui ont fleuri, à ces automnes qui ont fané et aux maints hivers qui ont trépassé. Ces souvenirs, ces instants de joie, de bonheur, mais aussi ces instants de tristesse, de solitude. Tant de choses sont encore en moi, des souvenirs si profondément enfouis, qui tournent toujours et encore dans ma tête. Si souvent, je les ai chassés pour essayer de les oublier. Mais cela était en vain. Au fond de moi, je savais que jamais je ne réussirais à les faire disparaître. Du plus heureux au plus douloureux souvenir, ils font tous partie de moi.
Il y a si longtemps que j’ai mis ces souvenirs de côté, pour essayer de ne plus y revenir. Voyant ce paysage si familier, je vois ressurgir de nombreuses images que je croyais disparues. Ces nombreuses fêtes que l’on venait célébrer ici, et principalement l’une d’elles dont je me rappelle, qui a emporté mon meilleur ami. Personne n’avait pu le sauver de ces vagues qui se déchaînaient sur lui. Personne, y compris moi. Pendant d’innombrables années, je m’en suis voulu de n’avoir pu veiller sur lui. Je m’en suis voulu de l’avoir abandonné. Et je suis revenue ici tant de fois, pour essayer de comprendre, pour essayer de me pardonner. Et maintenant enfin, je comprends. Nul ne peut aller contre le destin. Et nul ne peut prévoir ce que la vie réserve à chaque être. Nul, y compris moi.
Je dois cependant avouer que maintes fois, j’y ai eu des moments heureux. Je me vois encore là, sur cette plage, à courir et à rire avec ceux que j’aime. J’étais là, les deux pieds dans l’eau, avec maman à mes côtés me tenant par la main, me disant de ne pas aller trop loin dans la mer. Sachant que cela l’inquiétait de me voir seule dans l’eau, je retournais vers elle et me couchais dans le sable doux à ses côtés. Alors je voyais son visage s’emplir de joie et de lumière. Je lui souriais, elle me caressait les cheveux, et à chaque fois, elle me chuchotait doucement ces mots remplis de tendresse à l’oreille : « Je t’aime. »
Tandis que l’astre du jour disparaît derrière l’horizon pour faire place à la nuit, je suis là, assise toute seule, devant la plage qui m’a vu grandir. J’y ai vécu une enfance paisible, enrichissante, et pleine d’affection. Cependant, j’y ai également vécu des moments très douloureux, très éprouvants. Mais aujourd’hui, je repense enfin à tout ce qu’il s’y est passé, aux temps des rires, aux temps des larmes. Peu de gens, je pense, peuvent trouver en eux le chemin qui mène à la paix, en soi. Je ne regrette rien à présent, car je sais que toutes ces choses, bonnes et mauvaises, m’ont permis d’être celle que je suis devenue. J’ai enfin réussi à faire la paix avec mes souvenirs…

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Très beau texte!

Anonyme a dit…


Quel texte!!! Rempli de belle poésie.
Il y a du talent que se cache là...