Par Marie-Catherine Bolduc (Finaliste du
concours Ma plus belle histoire. À surveiller : la lecture publique de Marie-Catherine à Québec!)
CEA de Saint-Prosper
Je m’appelle Hope,
ce qui veut dire espoir en français, et j’ai 9 ans. C’est mon grand-père qui a
choisi de m’appeler ainsi, car il dit que « où il y a de la vie, il y a de
l’espoir». Je dois avouer que je n’ai
pas eu une naissance comme les autres. Je suis née à 32 semaines de grossesse.
Mes parents ont eu un accident d’auto et ils sont morts subitement. Les médecins ont réussi à me sauver en me branchant sur une
multitude de machines. Ce sont mes grands-parents qui m’ont adoptée. Ils avaient
peur que je ne survive pas ou que je reste avec de graves malformations. Mais
non, j’étais un bébé en parfaite santé. Les médecins disaient que c’était
presqu’un miracle et je le crois aussi.
Je suis donc née en
juillet. Une chance, car c’est mon mois préféré, parce que j’adore les
papillons. J’ai toujours dit qu’il n’y avait pas de hasard dans la vie, ce
n’est que le destin. Pourquoi je sais tout ça à mon âge? Je ne sais pas, mais
je sais que je le sais. C’est à l’intérieur de moi, c’est tout. J’adore les
papillons, surtout les monarques. Selon moi, c’est avec eux que je peux parler
à mes parents. Les papillons sont magiques, car tous les messages que je leur
confie se rendent à mes parents et parfois même
à Dieu. C’est eux qui vont leur porter, j’en suis certaine.
Mes grands-parents
vivent à la campagne. Une chance aussi, car j’adore marcher dans le champ
derrière la maison. Tous les papillons viennent à moi, ils me suivent partout
dans le champ et lorsque je sors du champ, ils ne me suivent plus, à part un.
Lui, il est comme mon ange gardien. Il se colle même à la fenêtre de ma
chambre, le soir. Je crois qu’il veille sur moi et je le remercie tous les
jours d’être là. Les murs de ma chambre sont tapissés
de dessins de papillons que je dessine pendant l’hiver et la literie de
mon lit est aussi en papillons. Mon grand-père me dit souvent que je ne suis
pas une petite fille ordinaire. J’ai quelque chose, il ne sait pas c’est quoi,
mais il y a en moi une force, une sagesse qui me rendent ainsi. Et bien coudonc,
c’est ainsi que Dieu m'a créée.
Cet été-là, j’ai
passé mes vacances avec Jacob, le nouveau
voisin. J’étais contente de profiter de mes
vacances avec un ami, car je souffre souvent de la solitude. Il était comme mon
frère, un vrai complice. On s'amusait pendant de longues journées et on se
racontait toutes sortes d’histoires. Jacob était important pour moi et il l’est
devenu encore plus le jour où j’ai découvert qu’il était victime de violence
par son père. Mon instinct d’enfant me disait que ce n’était pas normal et que
je devais faire quelque chose. Mais quoi ? Lorsque Jacob s’est enfin décidé de m’en parler, il voulait venir
vivre chez moi, mais il voulait aussi que cela reste un secret. Je voulais en
parler à mes grands-parents, mais je ne voulais pas perdre la confiance de mon
ami, je ne trouvais pas que son secret devait rester secret. Je devais faire
quelque chose.
Un soir de pleine
lune, j’ai décidé d’aller espionner par la fenêtre du salon chez Jacob et j’ai
bien vu que toutes les ecchymoses qu’avait Jacob n’étaient pas toutes causées
par le fait qu’on jouait à grimper aux arbres. Malheureusement, je n’ai rien pu
faire, car mon grand-père m’a surprise. Alors, je lui ai tout expliqué et il
m’a dit qu’il le savait et qu’il ne pouvait rien faire pour ça. Il m’a donc
envoyée en punition dans ma chambre. Je pleurais. Je savais que mon ami vivait
un dur moment et je voulais l’aider, mais je ne pouvais pas. Alors, j’ai prié
pour lui. J’ai demandé aux papillons et à mes parents de l’aider et de le
libérer de cette violence. Fatiguée, je me suis endormie ainsi.
Aux petites heures
du matin, je fus réveillée par la sirène des policiers et des ambulanciers.
J’ai aussitôt regardé par ma fenêtre et j’ai compris que ce bruit résonnait de chez Jacob. Bien sûr, comme je m’apprêtais à sortir,
mon grand-père m’en a empêchée. Il s'est agenouillé et
m’a prise dans ses bras. Il m’a dit que Jacob était tombé du toit durant la nuit,
car il voulait échapper à son père. Mais malheureusement, sa chute fut
mortelle. Jacob était mort.
Après la mort de
Jacob, j’ai compris que la vie pouvait parfois être très douloureuse et
cruelle. Je me suis rendu compte aussi que les problèmes arrivent lorsqu’on
grandit, c’est pourquoi je regrette déjà le futur. Tout ce que j’ai hâte de
savoir, ce sont les mots que je vais apprendre pour expliquer au gens comment
je me sens. Je n’oublierai jamais Jacob. Le jour de ses
funérailles, il y avait tout plein de papillons et je leur ai demandé de venir
me dire comment Jacob allait dans l’autre monde et s’il était devenu un ange.
Parfois, je me demande où se cache la vraie vie, entre celle de Jacob, de mes
parents et de la mienne. Mon grand-père m’a encore demandé où j’allais chercher
tout ça. Je lui ai simplement répondu : « Je ne sais pas d’où ça
vient, grand-papa. Peut-être des papillons, mais je sais que je le sais, c’est
là, à l’intérieur de moi, c’est tout. »
1 commentaire:
Bonjour Marie-Catherine,
Félicitations pour ton prix et bravo pour ce texte... C'est simple et c'est touchant, deux belles qualités pour un écrivain: trouver les bons mots pour faire vivre des émotions au lecteur. Bien réussi! Je te souhaite de continuer à écrire longtemps!
Sophie Perron, enseignante au CEA de Sainte-Justine
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